Les aventures de Coraline et Konpè Manicou à l’Habitation Clément /Conte 2 : la part des anges

Au clair de lune, Coraline suit Konpè Manicou dans le jardin de l’Habitation Clément. La jeune sirèz regrette déjà d’avoir laissé ce petit marsupial espiègle en liberté en échange de soi-disant trésors. « Tchip, pa ni piès trézòisi ya. Man key viré mété’y a adan ti bwèt-li2», pense-t-elle. Konpè Manicou, de son côté, est bien content de pouvoir respirer l’air frais de la nuit. De toutes façons l’Habitation Clément regorge de secrets insoupçonnés. Ça ne sera pas difficile de tenir sa promesse. 

« Milim ! », crie-t-il. Coraline est dubitative : « milim ki sa ? Qu’est-ce que je fais avec trois grands hangars, han ! Sacré coquin, je sens que tu vas retourner dans ta… ». « Sans couper ta parole », lui lance Konpè Manikou. Il la rale par le bras pour la faire entrer dans un des bâtiments et l’oblige à s’accroupir.

Devant eux se dressent deux immenses pyramides de tonneaux. Coraline fait rôle6 de ne pas être impressionnée : « Pff, c’est tout ce que tu as à me montrer ?! ».  « Cache-toi !», ordonne l’animal. « Jénérasyon ta la pa ni pasyans7 » se dit Konpè Manikou qui monte quatre à quatre au sommet de la pyramide sans attendre Coraline. Quant à elle, elle tente de le suivre mais se prend les pieds dans sa longue jupe et se retrouve fesses à terre. 

« Et alors Konpè mwen ! » lança une voix grave. Coraline court se cacher derrière un tonneau. « L’air de ta boîte n’allait plus avec toi ? » poursuit-il. « C’est ça. Il est revenu s’étourdir avec les senteurs de notre rhum comme antan lontan ! » complète une voix chantante.

Plus Coraline tord son cou pour voir ce qu’il se passe en haut de cette montagne  de tonneaux moins elle y voit quoique ce soit. Konpè Manikou qui a rampé avec la vitesse d’un mabouya se trouve déjà à ses pieds. La joie se lit sur son visage : « tu les as vus ? » demande-t-il. Mais Coraline ne prend pas la blague : « ki sa ka alé la1 ? A qui tu parlais ? Je n’ai vu personne !? ».

Konpè Manikou enroule la main de Coraline avec sa queue et l’amène au pied des pyramides. Coraline s’arrête net. Deux bêtes à zèl virevoltent au dessus des tonneaux, humant leur parfum. « Tu vois, chuchote le manicou, ces anges veillent sur le rhum ». « Mmmmm ! Celui-ci est plutôt épicé », commente l’ange à la voix grave. « Celui-là a des notes grillées. Mmm.. Fout i ka santi bon2 ! » s’exclame l’esprit à la voix qui chante. 

Coraline découvre alors que de légères vapeurs flottantes sont happées par les deux anges.  «  En échange, ils prennent leur part ! Ils ne doivent pas savoir qu’un humain les observe sinon, yo ka chapé1 ! C’est leur secret ! ». 

Coraline reste estébécouée puis se ressaisissant : « je te l’accorde manikou, ça c’est un gros milan. Ou ni chans’ ti manikou… Mais j’attends de voir ce que tu pourras bien dénicher d’autre ici… ».